Vous la connaissez sûrement sous l’appellation de « pipi au lit » : l’énurésie est fréquente, surtout chez les enfants de moins de 5 ans. Mais à quoi est-elle due et comment la prendre en charge ? Décryptage.
Énurésie : qu’est-ce-que c’est ?
On parle d’énurésie en présence d’une émission d’urine complète, involontaire, répétée, incontrôlable et inconsciente de la part de l’enfant, celle-ci survenant généralement pendant son sommeil. Il s’agit d’un trouble fréquent du contrôle de la vessie, car il touche environ 10% des enfants de 5 à 10 ans, selon l’Association française d’urologie. Pour rappel, le contrôle des sphincters résulte d’un apprentissage de l’enfant qui peut s’étendre sur plusieurs années, avec diverses variations d’un petit à l’autre.
Il existe en fait deux types d’énurésie :
- L’énurésie primaire. Elle n’est pas précédée d’une période au cours de laquelle l’enfant a été propre pendant au moins six mois. C’est la forme la plus fréquente, puisque 75 à 85% des jeunes enfants la vivent. Elle fait partie du processus amenant l’enfant à devenir propre.
- L’énurésie secondaire. Dans ce cas, l’enfant a connu une période d’au moins six mois durant laquelle il a été propre. Cette forme d’énurésie débute généralement entre 5 et 7 ans.
D’une manière générale, l’énurésie peut être soit :
- Régulière, mais avec des fréquences plus ou moins élevées en fonction des périodes ;
- Irrégulière ;
- Intermittente : les périodes d’émission d’urine nocturne peuvent alterner avec de longues périodes sans aucune miction non maîtrisée ;
- Episodique : il s’agit alors d’un « incident » isolé.
Énurésie : quelles sont les causes ?
Les causes de l’énurésie sont diverses :
- Une vessie plus petite que la moyenne et qui se remplit donc plus facilement.
- Une vessie qui se contracte trop, en raison d’un retard dans son processus naturel de maturation.
- Une production trop importante d’urine pendant la nuit, à cause d’une baisse de sécrétion de l’hormone anti-diurétique (ADH) : ce trouble est souvent héréditaire.
- La génétique joue d’ailleurs un rôle dans l’énurésie : dans 30 à 60% des cas, l’un des parents a également subi ce trouble.
- En cas de prématurité.
- Si l’enfant est atteint d’un trouble du déficit de l’attention et hyperactivité (TDAH).
D’autres causes liées au sommeil de l’enfant peuvent intervenir. Par exemple si son sommeil est particulièrement profond, avec moins de réveils nocturnes que la moyenne. Mais aussi en cas de troubles tels que l’apnée du sommeil, bien que plus rare chez l’enfant. Il est également possible que l’énurésie découle d’une consommation trop abondante de boissons le soir, en particulier si elles sont sucrées.
Quid des causes psychologiques ? Si elles existent bel et bien, elles ont longtemps été considérées, à tort, comme la seule explication possible à l’énurésie. Difficultés scolaires ou familiales, manque de confiance en soi, refus de grandir en autonomie, deuil, arrivée d’un nouveau membre dans la fratrie… Ce sont autant de motifs qui peuvent agir sur l’inconscient de votre enfant et agir durant son sommeil. Dans ce cas, l’énurésie peut s’accompagner d’agitation, de cauchemars, etc.
Énurésie et diabète : les symptômes à surveiller
Le diabète de type 1 est le plus fréquent chez l’enfant et se déclare généralement avant 20 ans (il est également nommé « diabète juvénile »). Il se caractérise par un excès de sucre dans le sang, l’hyperglycémie, lié à l’absence de sécrétion d’insuline par le pancréas. Il se manifeste par plusieurs symptômes, dont l’énurésie secondaire :
- L’enfant a de fréquentes envies d’uriner, en quantités abondantes.
- Il a anormalement soif.
- Il a toujours bon appétit mais connaît un amaigrissement important.
- Il se sent anormalement fatigué.
La présence de ces symptômes nécessite de consulter rapidement un médecin.
Énurésie : quelles conséquences ?
L’impact de l’énurésie chez l’enfant sont essentiellement psychologiques : l’enfant subit une souvent une baisse de l’estime de soi et de sa confiance en lui. Cela peut entraîner des perturbations dans sa vie familiale et sociale. Honteux, il peut refuser d’en discuter, d’aller dormir chez des camarades de classe, ou encore appréhender le moment de se coucher. Il est primordial de le rassurer et d’éviter toute moquerie.
Énurésie : comment réagir et comment la traiter ?
La prise en charge de l’énurésie est diverse et commence par des mesures d’hygiène, diététiques et comportementales. Si cela ne suffit pas, une consultation médicale peut être envisagée. Dans tous les cas, rassurez-vous, l’énurésie est un trouble passager qui se résorbe le plus souvent tout seul.
Ce que vous pouvez faire si votre enfant souffre d’énurésie
Avant tout, il est essentiel de rassurer votre enfant et de le déculpabiliser : expliquez-lui la situation avec des mots simples, sans jamais le gronder mais en l’encourageant avec la perspective que la situation va s’améliorer.
Pour anticiper une éventuelle consultation, vous pouvez lui faire tenir un calendrier des nuits « sèches » et « mouillées » : un bon moyen de le responsabiliser, de le motiver et de le faire participer à sa prise en charge.
D’autres mesures peuvent être utiles :
- Limitez votre enfant à un verre d’eau le soir (et plus généralement, faites-le boire en continu tout au long de la journée, mais de façon limitée à partir de 18 heures).
- Faites attention aux potages au dîner, qui lui fournissent de l’eau en grande quantité !
- N’oubliez pas de l’inciter à aller aux toilettes avant de se coucher.
- Invitez-le à aller aux toilettes plusieurs fois dans la journée et répétez-lui d’y aller dès qu’il en ressent l’envie.
- Rappelez-lui qu’il doit être détendu lorsqu’il fait pipi, sans forcer ni pousser.
- Facilitez-lui l’accès aux toilettes, la nuit : vous pouvez, par exemple, lui donner une petite veilleuse qu’il pourra facilement allumer et emporter avec lui s’il a besoin de se lever.
- Ne réveillez pas votre enfant pour le faire aller aux toilettes pendant la nuit ou pour le changer : le sommeil reste l’essentiel.
- Au réveil et s’il a beaucoup mouillé son lit, aidez-le à se nettoyer pour éviter les odeurs.
Énurésie : quand consulter ?
La consultation avec votre médecin traitant ou son pédiatre devient nécessaire si :
- L’énurésie persiste pendant plusieurs semaines après la mise en place de ces mesures.
- Elle persiste au-delà de l’âge de 6 ans.
- Votre enfant est atteint d’un TDAH.
- Les répercussions psychologiques sont importantes chez lui et cela perturbe sa vie familiale et sociale.
La consultation est d’autant plus urgente si votre enfant subit d’autres troubles urinaires durant la journée (besoins d’uriner très fréquents et incontrôlables, brûlures lors de la miction), si vous suspectez un diabète ou si l’énurésie s’accompagne de fièvre.
Énurésie : des traitements possibles ?
Votre médecin commencera par poser à votre enfant et à vous de nombreuses questions sur le comportement de l’enfant, les caractéristiques de ce trouble, d’autres symptômes associés et d’éventuels facteurs psychologiques. Il procède ensuite à un examen clinique classique, suivi d’analyses complémentaires s’il suspecte la présence de diabète. Enfin, après un rappel des mesures hygiéno-diététiques à appliquer, il prescrit le traitement le plus adapté au cas de votre enfant, s’il est âgé de plus de 6 ans :
- La prise de desmopressine pendant 3 à 6 mois, qui imite l’action de l’hormone antidiurétique en retenant l’eau dans l’organisme. La mise en route du traitement doit être étroitement surveillée, afin d’éviter tout risque de surdosage qui pourrait conduire à une intoxication par l’eau (qui se manifeste par une augmentation importante du poids sur un court délai, une fatigue inhabituelle, un manque d’appétit, des nausées, des maux de tête…). Le traitement est ensuite arrêté progressivement, afin d’évaluer l’évolution de la situation.
- L’oxybutynine est prescrite en cas d’échec du précédent traitement ou si votre enfant dispose d’une vessie hyperactive et de petite capacité. Ce médicament augmente la capacité de la vessie en lui permettant de relâcher ses muscles. Des effets secondaires sont possibles (sécheresse buccale, maux de tête, constipation ou diarrhée) mais disparaissent en quelques jours.
- Si votre enfant est d’accord et motivé, votre médecin peut également vous prescrire le traitement par « alarmes » (également appelé « méthode de conditionnement ») : un capteur est fixé sur l’épaule de votre enfant, relié à une électrode située dans son sous-vêtement. Cela permet à l’alarme sonore de se déclencher dès les premières gouttes d’urine émises. C’est alors à l’enfant de couper la sonnerie, d’aller aux toilettes puis de réinstaller le mécanisme au moment de se recoucher.
Enfin, si votre enfant souffre psychologiquement de son énurésie, vous pouvez lui proposer de suivre une psychothérapie ou une thérapie comportementale et cognitive.